"Un compte rendu de cet ordre devrait embrasser également l'évolution des conceptions relatives au crime politique et à l'asile politique, à la justiciabilité des actes politiques et des décisions politiques prises selon une procédure judiciaire ; il devrait inclure jusqu'à la question de fond, celle du procès en justice proprement dit, c'est-à-dire examiner dans quelle mesure la procédure judiciaire en tant que telle modifie à elle seule la matière de son objet en la faisant passer à un autre état."

Carl Schmitt, préface à La notion de politique (1963).

lundi 3 novembre 2014

Sexualité, génétique et famille L’homoparentalité en question


Mère porteuse, père donneur de sperme, échange des rôles entre homme et femme, adoption de l’enfant d’un autre, toutes ses institutions étaient de très longues dates déjà présentes dans le Droit. Mais elles servaient dans le cadre de la famille clanique, et pour sa perpétuation. Il a fallu la désagrégation du clan, structure sociale élémentaire, qui s’est opérée sous le coup de la montée de l’égalité entre les sexes, au moyen du mariage, érigé en modèle familial alternatif, pour que ces instruments, désormais sortis du cadre pour lequel ils avaient été élaborés, servent les fins du ménage homosexuel, lui-même rendu possible par une conception extrémiste de l’égalité. Aussi le mariage tel que nous le connaissons, le mariage égalitaire, et même le couple parental égalitaire, bien loin de représenter le modèle adverse du couple homosexuel, en constitue-t-il bien plutôt le tremplin.

1.         L’union matrimoniale entre personnes de même sexe est maintenant un donné de la législation française. Quoique la polémique ne soit pas éteinte pour autant, elle tend naturellement à se déplacer sur la question connexe de la parentalité homosexuelle. Il ne pourra en résulter qu’une clarification de la situation, car il était artificiel de distinguer la filiation du mariage, qui y a toujours trouvé sa seule raison d’être. Mais il faut bien noter que la question ne se pose plus dans les mêmes termes. Juridiquement, les termes du problème sont mêmes inversés. Le mariage homosexuel présupposait, plus qu’il ne réalisait, une parfaite égalité de condition juridique entre homme et femme, égalité allant même jusqu’à l’indifférenciation. Au contraire, la parentalité homosexuelle maintient une différenciation des rôles parentaux qu’au demeurant elle est encore, en l’état actuel des choses, bien obligée d’accepter. L’enfant est génétiquement issu, à part égales, d’une cellule mâle et d’une cellule femelle. On n’a donc pas suffisamment remarqué que la parentalité homosexuelle, si elle suppose, on l’a dit, une préalable égalité de statut entre les deux sexes, n’entraîne pas une parfaite indifférenciation des rôles parentaux, qui demeurent sexués.

jeudi 11 septembre 2014

Affaire Werlet : de la liberté d’expression à la police de la pensée

Le 11 septembre 2014 la XVIIème chambre correctionnelle du Tribunal de grande instance de Paris a condamné Thomas Werlet, directeur de la publication du site internet Le National émancipé, pour provocation à la haine raciale, prétendument à cause de la publication d’un article relatif à la mémoire de l’amiral Horty, en réalité pour délit d’opinion.

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mercredi 30 juillet 2014

Faits survenus au détriment de Nawar DARWICH

A l’aube du 4 aout 2013, à 04h30, dans la Région de Lataquieh Nord, les villages d’Hanbouchieh, d’Inbata, de Ballouta, de Barmasa, de Baroudeh et d’al kharrata étaient envahis par des bandes armées appartenant aux groupes criminels de « Jabhat Annousra » et de ladite « Armée Syrienne Libre ».
Ils livraient les villages aux flammes et à la destruction. Ils tuaient ou enlevaient hommes, femmes, enfants et vieillards.
Nawar DARWICH était alors à Lataquieh. A 5h30 il recevait un appel téléphonique de sa soeur Fatima passé du village d’Alhambouchiyeh. Hurlant et pleurant, elle lui disait que les terroristes avaient encerclé leur village. Il entendait en même temps des tirs intensifs d’armes à feu. Sa sœur l’informait que les terroristes avaient égorgé leur voisin et parent Wahib MARIAM. Soudain Fatima DARWICH se mettait à appeler son frère en hurlant, avant de s’effondrer, lui disant avoir été touchée par une balle. La communication était coupée et Nawar DARWICH ne parvenait pas à rétablir le contact.
Il essayait encore de joindre son frère Barakat DARWICH, sans plus de succès. Il partait aussitôt pour son village, accompagné de son ami Basel AHMAD. En partant, sur le téléphone de son frère, il parvenait à joindre la femme de ce dernier qui lui répondait dans un état de panique et en pleurs. Elle l’informait de ce que les terroristes avaient égorgé son mari, ainsi que sa propre sœur Haifaa. Elle se tenait cachée dans sa maison, encerclée de tous côtés. Nawar tentait à plusieurs reprises de rappeler sa belle-sœur, sans succès.
Il essayait également de joindre plusieurs autres personnes de son village. Sur le téléphone de son frère Yazan, un inconnu décrochait qui lui demandait ce qu’il voulait. Nawar lui répondait vouloir parler à son frère. Son interlocuteur lui disait l’avoir égorgé, et lui proposait de venir récupérer le corps. Sur le refus de Nawar, l’inconnu déversait un flot d’insultes contre lui et contre tous les alaouites, puis raccrochait.
Arrivés au village d’Obein, vers 10h00 du matin, Nawar et son compagnon étaient contraints de rebrousser chemin, les terroristes ayant occupé de nombreux villages.
Après le départ des terroristes, Nawar partait à la recherche de ses parents. Sa maison, située à l’entrée du village, était en grande partie détruite. Il en parcourait les pièces désertes. Il montait sur le toit. Là il avait le choc d’y découvrir les cadavres de sa mère, de sa sœur Fatima, de sa nièce Rim et de son frère Yazan. Il ne retrouvait les autres membres de sa famille. Quelque temps plus tard seulement, l’Armée Arabe Syrienne découvrait un charnier dans le village, et il pouvait y reconnaitre le corps de son père Ali, et celui de Son frère Barakat.
Monsieur Nawar DARWICH perdait son père Ali, 85 ou 90 ans, et sa mère, Minna, 60 ans, son frère Mohammed, 30 ans, était enlevé, et ses frères et soeurs, Chama , Fatima, 23 ans, Yazan, 19 ans, et Barakat, 50 ans, étaient tués ; l’épouse de ce dernier, Hasna, était enlevée, dont la propre sœur, Haifaa, 30 ans, était tuée, et dont les trois enfants Ali, Abdelkarim et Abir étaient enlevés ; il perdait aussi son grand-oncle maternel, Imad CHEIKH IBRAHIM, la femme de ce dernier, Mouna, étaient enlevée, leurs filles Lotus, Samara et Inaam, et leurs fils Bachar, Jaafar et Ahmad, étaient enlevés, et leur fille Marah, 17 ans, était assassinée ; il perdait aussi son oncle Charif, 80 ans, la femme de ce dernier, Mounira, 70 ans, ainsi que leur fils Mounif, 50 ans, dont la femme, Dawlat, 45 ans, était enlevée avec sa fille Rouwane, 20 ans, leur second fils Mounzer, 36 ans, était enlevé avec sa femme Hala, 34 ans, enceinte, et leurs deux enfants Bana, 4 ans, et Sham, 2 ans ; Nawar perdait enfin ses neveux Issam, Rim, 20 ans, Safwan et Chableh.
 
La tante de Nawar, sœur de Thabet, Dalal,46 ans, était enlevée avec Salloum MARIAM, 50 ans, son époux, le fils de ces derniers, Hamzeh, 17 ans, était tué. Taher, 80 ans, frère de Salloum MARIAM, était tué, et sa femme Nadera, 70 ans, enlevée, Ibrahim, 75 ans, second frère de Salloum, était tué, et sa femme, Wajiha, 70 ans, enlevée. Dans la famille MARIAM, les frères Yasser, 38 ans, et Wahib, 50 ans, étaient tués, la femme de ce dernier, Karima CHEKOUHI, 45 ans, était enlevée, avec ses deux filles, Faten, 26 ans, et Wedad, 25 ans, tandis que ses fils, Adel, 30 ans, et Wael, 28 ans, étaient tués, la femme de ce dernier, Elene, 26 ans, était enlevée avec leurs deux filles Douaa, 5 ans, et Alaa, 3 ans.
 
L’épouse de Ahmad MARIAM, Lamia CHEHADE, 60 ans, était tuée, leurs trois enfants, Asrar, 27 ans, Narjess, 29 ans, et Intissar, 32 ans, ainsi que leur petit-fils Jaafar ISMAIL, 2 ans, étaient enlevés.
Rifaat MARIAM, 75 ans, était tué, sa femme Kheizeran, 55 ans, enlevée, leur fils Ayman, 35 ans, tué aussi, alors que l’épouse de ce dernier, Lina, 35 ans, était enlevée avec ses cinq enfants Ahmad, Farah, Marah, Mohamad et Dalaa.
L’épouse de Bassem MARIAM, Fadia YASSINE,30 ans, était tuée avec ses trois enfants, Hussein, Furat et Mais.
L’épouse de Fayad MARIAM, Wissam TREBOUCHE, 35 ans, était tuée avec ses deux nouveaux-nés Marah et Hala, et ses deux fils, Ghaydak et Haidar étaient enlevés.
Dans la famille CHEKOUHI, alliée des MARIAM, l’épouse de Tamer, Nazira ARIFO, 90 ans, était enlevée, son fils, Fadl, 80 ans, était tué avec son épouse Wathifa, 50 ans, tandis que les trois enfants de ses derniers, Afaf, 25 ans, Kinana, 27 ans, et Moustafa, 24 ans, étaient enlevés, son autre fils Hani, 45 ans, était aussi tué et sa propre épouse Wissal NASSER, 40 ans, enlevée avec leurs deux enfants Tamer, 3 ans, et Tim, 1 ans.
 
Dans la famille TREBOUCHE, elle aussi alliée des MARIAM, Khoudr, 13 ans, était enlevé. Enfin dans la famille HAIDAR, elle encore alliée des MARIAM, Yazan, 9 ou 11 ans, était enlevé.
 
 

Genèse de la crise syrienne (2011-2012)

En Tunisie, sous prétexte du suicide, le 17 décembre 2010, d’un vendeur de fruits et légumes ambulants, une succession de manifestations plus ou moins spontanées mélées de graves troubles à l’ordre public, conduisaient de manière confuse à la fuite, le 14 janvier 2011, du Président tunisien Ben Ali. S’en suivaient des évènements similaires en Egypte puis en Lybie, phénomène présenté comme un embrasement de partie des pays du Maghreb et du Proche-Orient, qu’on a dénommé « printemps arabes ». Le 11 février de la même année le Président Egyptien Hosni Moubarak démissionnait. En Lybie, une coalition composée des Etats-Unis, du Royaume-Uni, du Canada et de la France intervenait en mars, et le pays basculait dans la guerre civile.
 
Cependant, en Syrie, nation multiconfessionnelle, les premiers appels, réitérés chaque vendredi au sortir de la prière, à manifester pour obtenir le départ du Président Bachar AL ASSAD, stigmatisé comme alaouite, demeuraient d’abord sans effet. Puis, en l’espace de dix jours, suite à deux manifestations ayant bien eu lieu dans la ville de Deraa, les 15 et 16 mars, tardivement donc, plus laborieusement qu’en Tunisie ou qu’en Egypte, les évènements commençaient. A Deraa donc, le 16 mars, lors d’une manifestation de fonctionnaires revendiquant une augmentation de leur traitement, on comptait des morts et des blessés par balles, tant côté forces de l’ordre que côté manifestants. Où l’on peut soupçonner, comme en Egypte, le fait de mystérieux tireurs d’élite. Et la rumeur se répandait d’enfants arrêtés et torturés par la police pour avoir taggué un slogan hostile au chef de l’Etat. Des chaines de télévision saoudiennes et qatariennes diffusaient des scènes de manifestations de masse sensées essaimer dans tout le pays, des sectes islamistes tentaient de dresser la population sunnite contre les chrétiens, chiites et alaouites, tandis que de petits groupes armés commençaient de semer la terreur.
 
En l’espace de six mois la nation syrienne allait entrer dans les convulsions de la crise dont elle n’est toujours pas sortie à ce jour. Tout en assurant le maintien de l’ordre public, les gouvernements successifs promettaient et engageaient des réformes, et en gage de volonté d’apaisement plusieurs amnisties générales étaient prononcées par le Président, qui libéraient toutes les personnes arrêtées dans le cadre de la répression des manifestations (14 avril, 31 mai, 21 juin et plus tard encore, le 15 novembre). Mais semaine après semaine les choses allaient prenant une tournure de plus en plus tragique. Le 6 juin 2011 plus de cent vingt agents des forces de l’ordre mourraient à Jisr al-Choughour. Eté 2011 l’on voyait se multiplier les bandes armées. S’affirmait également, et ce dès le départ, la dimension hautement internationale du conflit. Pays stratégiquement situé, riche de ressources énergétiques (gaz et pétrole), fier d’une indépendance âprement conquise, d’une guerre mondiale l’autre, sur une armée d’occupation française qui croyait pouvoir succéder à l’Ottoman, aussitôt, dès 1948, pris dans le conflit régional, la Syrie était depuis 2001 l’objet de pressions internationales grandissantes. Les Etats-Unis d’Amérique, l’Angleterre et la France s’opposaient, au sein du conseil de sécurité de l’Organisation des Nations Unies (ONU), à la Russie et à la Chine (résolution occidentale repoussée le 27 avril 2011, le 3 août 2011, le 4 octobre 2011, le 4 février 2012, le 19 juillet 2012). Entraient en scène la Commission des droits de l’Homme de l’ONU et Human Rights Watch (rapports du 1er juin 2011, 11 novembre 2011, 15 décembre 2011 et 3 juillet 2012). Insistons enfin, dimension essentielle du conflit, sur l’intense propagande à laquelle se livraient depuis l’étranger certains responsables religieux, ce qui commençait d’entraîner, dès avant septembre 2011, l’entrée clandestine en Syrie, depuis la Turquie, l’Irak, la Jordanie et le Liban, d’étrangers venus de tous pays (plus de 80 nationalités différentes ont été recensées). En septembre 2011 le conflit se durcit de l’arrivée en Syrie de terroristes Lybiens.
 
En octobre 2011 on menaçait déjà la Syrie d’une intervention militaire directe de la part de l’OTAN. le 24 octobre les Etats Unis d’Amérique rappellent leur ambassadeur. Le 28 octobre 2011 « l’opposition » demandait à la communauté internationale « une zone d’exclusion aérienne », comme en Lybie, pays dont le chef venait de mourir sauvagement assassiné (le 20 octobre) lors d’un raid de l’OTAN soigneusement filmé et montré au monde entier. Le 12 novembre 2011 la Syrie était suspendue de la Ligue arabe, et Turquie et Jordanie appelaient au départ du Président Bachar AL ASSAD.
 
Depuis l’été 2011, mais plus encore à partir de l’automne 2011, l’armée syrienne s’était engagée dans des combats stratégiques contre la rébellion, avec notamment le siège de BABA AMR, quartier populaire de HOMS, quasi-vidé de ses habitants, où se regroupaient la plupart des takfiristes syriens. Ils proclamaient un émirat islamique en février 2012. BABA AMR était repris, le 1er mars 2011, marquant l’échec de la tentative de reproduire le scénario Lybien, et, avec l’emprisonnement des takfiristes, la fin de cette phase des combats. Mais les vagues incessantes de terroristes venus de l’étranger faisaient que le conflit allait s’éternisant, car entre temps les attentats s’étaient multipliés, semant la terreur dans tout le pays. Les attentats du 23 décembre 2011, du 6 janvier 2012 et du 10 février 2012 portaient déjà la signature d’un certain terrorisme. Le 11 février 2012, lendemain donc du dernier de cette série (qui continuera : 17 mars 2012, 27 avril 2012, 22 février 2013 etc.), le chef d’Al Qaida déclarait son soutien à la rébellion contre le Président Bachar AL ASSAD. Et le surlendemain, le 12 février donc, la Ligue arabe annonçait son intention d’armer l’insurrection.
 
Le 28 mars 2012 le Président Bachar AL ASSAD acceptait le plan de paix dressé par l’envoyé spécial du Conseil de sécurité de l’ONU. La légitimité du régime syrien ne pouvait plus être sérieusement contestée et l’ordre devait être rétabli, le conflit prenant nettement la noire tournure d’une lutte contre un terrorisme frappant aveuglément et orchestrant, de manière très médiatique, une violence à outrance que tantôt l’on impute au pouvoir pour dresser les esprits contre lui, tantôt que l’on revendique comme un trophée destiné à effrayer (massacres du 25 mai 2012, apparition d’un « Front Jabhat Al-Nosra », affilié à Al-Qaïda).